Une journée des sols : Katibougou dans la région de Koulikoro sert de cadre..
Journée mondiale des sols: À Katibougou, la santé des sols, un enjeu politique majeur..
Face à une dégradation accélérée des terres, le Mali veut se repositionner comme acteur majeur de la transition agroécologique au Sahel. À Katibougou, ce mercredi 10 Decembre 2025, lors de la Journée mondiale des sols, les autorités, les chercheurs et les partenaires techniques ont affiché une volonté politique assumée : replacer la santé des sols au cœur de la souveraineté alimentaire nationale.
Dans la cour de l'institut polytechnique rural de formation et de la Recherche Appliquée, l’ambiance est plus proche d’un mini-sommet que d’une simple commémoration scientifique. Ministres, experts, bailleurs et étudiants se pressent pour une Journée mondiale des sols qui ne dit pas son nom : une réunion stratégique sur l’avenir agricole du Mali. La cérémonie est coprésidée par le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche Scientifique, Pr Bouréma Kansaye et le ministre de l’agriculture Daniel Simeon Kelema, en présence du Directeur Pays AGRA-Mali, Pr Bocar Ahamadou Touré.
À l’heure où plus de 65 % des terres du pays montrent des signes de dégradation, l’événement donne l’occasion d’un discours clair : la question des sols quitte le domaine technique pour entrer pleinement dans la décision politique.
Ouvrant la cérémonie, le maire de Koulikoro, Aliou Tamboura, n’a pas cherché à arrondir les angles.
« La santé des sols n’est pas un luxe scientifique. Sans sol vivant, aucun projet de souveraineté n’est possible », lance-t-il devant une salle attentive. Avant d’ajouter que « Sans sol vivant, aucun projet de souveraineté n’est possible »
Pour l’élu, les pressions combinées du climat, de l’urbanisation et des pratiques agricoles inadaptées ont transformé la fertilité des terres en question de sécurité nationale.
La coordinatrice du programme Soil Values, Nyamoui Traoré, rappelle que le Mali dispose d’un atout stratégique : une expertise agronomique consolidée depuis deux décennies. « L’innovation seule ne suffit pas. Il faut former, accompagner, et intégrer les producteurs dans la gestion durable de la fertilité », souligne-t-elle.
AGRA, partenaire de poids, enfonce le clou.
Pour le Directeur pays, Pr Toure, Le thème de cette année est plus qu'évocateur à un moment crucial de notre époque où les ressources en terres, à savoir les sols, l'eau et la biodiversite, constituent les fondements de la richesse de notre pays et de notre économie. Elles répondent à des besoins et à des désirs qui ne cessent de croitre en termes de nourriture, d'eau, de carburant et de toutes autres matières premières essentielles qui façonnent nos moyens de subsistance et nos modes de vie.
« Quand un sol s’appauvrit, ce n’est pas qu’un champ qui meurt. C’est une chaîne entière des campagnes jusqu’aux centres urbains qui se fragilise », prévient Pr Bocar Ahamadou Touré, son directeur pays.
Pour lui, le pays doit désormais articuler science, gouvernance et engagement de la jeunesse pour espérer inverser la tendance.
Restaurer nos sols n'est pas seulement un impératif technique. C'est un acte de responsabilité envers nos villes, nos villages et nos enfants. C'est l'héritage que nous voulons transmettre aux générations futures, a-t-il déclaré. Il termine son intervention en disant ceci: De Nairobi à Katibougou, la transformation de la santé des sols devient réelle lorsque nous alignons la science, les politiques publiques et l'engagement de la jeunesse. Ensemble, nous pouvons bâtir un Mali plus résilient, plus productif et plus durable.
Le ministre de l’Agriculture, Daniel Imeon Kelema, inscrit l’événement dans la stratégie plus large des autorités de transition.
« La santé des sols est un pilier du MALI KURA NETAASIRA KA BEN SAN 2063 MA. Produire mieux et durablement n’est plus une option », déclare-t-il.
Il annonce ensuite l’un des chantiers agricoles les plus ambitieux de la décennie :
la Feuille de route malienne pour l’implémentation du Plan d’action africain sur les engrais et la santé des sols (2024-2034).
« Ce plan n’est pas une déclaration d’intention. C’est notre instrument de gouvernance pour les dix prochaines années », insiste-t-il.
Une manière de rappeler que le Mali entend peser dans les discussions régionales, notamment dans un Sahel où les terres arables déclinent rapidement.
Au-delà des discours, cette édition 2025 confirme une évolution notable : le Mali cherche à créer un narratif politique autour de la santé des sols, comparable à celui sur la souveraineté alimentaire ou la gestion de l’eau.
Issoufi MAIGA
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